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Bart Gruyaert devant l'usine Juy en présence de Réjane Estier 1er Adjointe de Crépy en Valois

 

 

Vous pouvez retrouver l'article du Courrier Picard à http://www.courrier-picard.fr/courrier/Actualites/Info-locale/Compiegne-Noyon-Creil/Il-y-a-quatre-responsables-de-la-fermeture-de-Juy-a-Crepy

 

A la veille, d'une fermeture prévisible, son avis est à considérer.

 

Le voici dans son intégralité

 

Samedi 09 Mars 2013

« Il y a quatre responsables de la fermeture de Juy à Crépy »

Bart Gruyaert revient sur l’historique du site de Juy, depuis le rachat par PMI jusqu’à sa fermeture prochaine. Bart Gruyaert, directeur des sites de Montataire et Crépy-en-Valois de Punch Metals International, s’explique sur les raisons qui ont conduit au redressement judiciaire.

Le directeur de Punch Metals International (PMI) pour les sites de Montataire et de Crépy a souhaité s’exprimer sur les différents événements qui ont conduit Juy à sa perte. Il pointe du doigt quatre responsables : l’actionnaire Guido Dumarey, l’État, le client Caterpillar et l’ancien directeur du site, mais souligne l’engagement et le dévouement de ses salariés.

Savez-vous pourquoi le groupe belge Punch Metals international s’est intéressé à l’entreprise Juy ?

Ce que je peux dire, c’est que la famille Mercier a géré l’entreprise très longtemps. Au début des années 2000, elle était rentable, mais il n’y a eu aucun investissement pour moderniser les lieux. En 2009, Caterpillar, qui était déjà le plus gros client de l’entreprise, a fait un courrier aux patrons. Il ne leur donnerait plus de nouvelles références car il n’y avait pas d’investissement. C’était le premier signe de désengagement de ce gros client. En 2011, Mercier est tombé malade. Caterpillar l’a convaincu de vendre.

Pourquoi PMI ?

Trois sociétés étaient intéressées, deux Belges et une Italienne. C’est PMI qui a été choisie. Guido Dumarey a acheté ce site pour 1,5 million d’euros, sans se poser les bonnes questions. Tout le monde était pressé de signer. Mercier était sur son lit d’hôpital et même si Guido est très dur en business, il peut avoir du cœur, et c’est ce qui s’est passé. Il a signé sans se demander si la société était pérenne et ça a été sa première erreur. Il ne fallait pas reprendre cette société qui avait de graves problèmes de pollution, qui connaissait déjà un désengagement de Caterpillar.

Quand avez-vous compris que la situation allait être compliquée ?

Quand je suis arrivé en mai, j’ai vu que le bâtiment n’était pas conforme. J’ai aussi constaté que 85 % du chiffre d’affaires était apporté par Caterpillar, ce n’est pas bon. J’ai donc mis en place une équipe de commerciaux qui avait pour but de diversifier la clientèle. Et puis, j’ai découvert que le précédent directeur du site, payé par Caterpillar, avait négocié une hausse de prix sur un temps donné. En contrepartie, Juy ne devait plus produire certaines pièces. Bien sûr, il ne m’avait rien dit sur cette contrepartie, que j’ai découvert plus tard. À partir de fin juin, c’était la dégringolade : Guido Dumarey ne voulait pas sortir l’argent pour qu’on s’installe sur le site de Case. Caterpillar a envoyé un courrier pour nous informer d’une baisse d’activité, qui a atteint 60% à la fin de l’été. En août, il y a eu l’incendie.

Quelles ont été les conséquences de cet incendie ?

J’allais devoir licencier 30 personnes. J’ai informé Guido Dumarey, il a répondu que ce n’était pas le moment car cela impliquait la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi, alors qu’il était en négociation pour reprendre General Motors à Strasbourg. Suite au feu, on a trouvé de l’amiante dans les locaux. L’État nous a alors envoyé quatre courriers en deux semaines. On ne pouvait plus rester à Crépy, on a délocalisé à Montataire. J’ai reparlé du PSE à Guido, il n’a pas voulu donner l’argent. On m’a demandé de continuer à mettre les gens au chômage. Et puis, il n’a plus voulu payer les salaires. Et enfin, Caterpillar s’est désengagé, malgré ses promesses.

Quelles leçons tirez-vous de tout cela ?

J’ai été écœuré. Écœuré de voir que le préfet me demande de remettre tout le monde au travail un soir à 19 heures pour qu’ils soient en poste dès le matin, mais lui n’a jamais fait l’effort de recevoir les salariés. Tout le monde s’occupe de Montataire car Hollande y est venu, mais Juy, Crépy, l’État s’en fout. Écœuré du désengagement de Caterpillar. Les salariés ont bossé pour eux depuis 30 ans, et eux n’ont jamais voulu faire un geste. Écœuré du comportement de Guido Dumarey, qui les a laissés tomber, et de l’ancien directeur, qui ne nous a pas tout dit. Je me reproche aussi beaucoup de naïveté. J’y ai cru jusqu’au bout, parce que j’avais des raisons d’y croire.

Quel message voulez vous donner aux salariés ?

Je continue à être fier d’eux. J’ai hésité à rester en poste, mais je l’ai fait, pour eux. Ailleurs, des salariés ont cassé, ont brûlé des pneus. Eux, sont restés dignes, ils ont continué à bosser, n’ont jamais cessé de travailler. Pourtant, ils n’intéressent pas les politiques aujourd’hui et c’est dommage. À Juy, nous avions un taux d’absentéisme pour maladie de moins d’1%, c’est exceptionnel. Il faut regarder les ex-Juy avec beaucoup de respect. Ils ont eu un comportement irréprochable, jusqu’à la dernière minute. Si des entreprises cherchent des salariés, qu’elles s’intéressent à eux.

Propos recueillis par CINDY LÉCRIVAIN

Tag(s) : #economie

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